Sport et Bouquins: Série de l'été (6)

Vous me connaissez un peu… “I’m no Yankee fan”. Dans la famille DiMaggio je suis plutôt Dominic que Joe. Mais bon aussi sympathique qu’a pu être Dom il n’a jamais été l’idole de la Nation. Son grand frère l’a été, et bien plus. Et c’est pour cela, pas pour le maillot qu’il portait que «  Joe DiMaggio : The Hero’s Life »  de Richard Ben Cramer est passionnant. A ce titre je me suis demandé si je devais inclure ce livre dans cette série de l’été tant il serait réducteur de mettre ce pavé de 500 et quelques pages au rayon « sport » de votre librairie favorite. Oui,il est question de sport, de son incroyable carrière, de son style divin, de ses records, de ses titres. Mais on pourrait tout aussi bien ranger l’ouvrage au rayon « Histoire » tant il décrit avec précision une époque de l’histoire américaine avec ses triomphes, ses réussites mais aussi ses côtés sombres, ses travers.


On connait tous le vers de Simon and Garfunkel dans « Mrs Robinson ». « Where have you gone JoeDiMaggio ? », la question pleine de nostalgie d’une Amérique qui doutait d’elle-même à la fin des années 60. JoeDiMaggio pour cette Amérique des années Woodstock et Vietnam c’était le symbole d’une époque plus simple, plus facile où l’Amérique jeune, insouciante, triomphait partout avec la fluidité et l’élégance du swing de Broadway Joe. Fils de pêcheur sicilien, né en Californie, triomphateur à New York, marié à Marilyn la fiancée de l’Amérique, tout le monde alors  avait une raison de l’aimer, de s’identifier à lui, de l’admirer, de le mettre sur un piédestal. Il était tout ce que l’Amérique espérait être. Il a donc été plus idéalisé que n’importe quelle personnalité de l’époque, sa femme y compris.

Le livre, évidemment, se devait de remettre de la réalité dans le mythe. Et en nous permettant d’aller dans les coulisses, dans la réalité de la vie de Joe, il nous montre une histoire moins lumineuse, moins triomphante, moins glorieuse mais surtout plus complexe, intéressante, en un mot, humaine. Radin, froid, égoïste, complexé, orgueilleux, jaloux, déprimé, violent, Joe Dimaggio n’était pas un homme heureux à qui tout réussissait. Sa vie fut en fait marquée par de nombreux échecs notamment dans ses relations avec ses proches. L’auteur résume ça parfaitement quand il dit : « Personne ne sait vraiment ce que cela a été d’avoir été un demi-siècle durant Joe DiMaggio, ce que le monde demandait à Joe DiMaggio d’être. Personne ne savait comme il le savait, ce que cela coute de vivre la vie d’un héros. Personne ne savait non plus, à par lui, ce que cela valait ».


Vous croiserez dans cette histoire épique à la fois la crème de la crème du baseball du milieu du siècle (Ruth, Gehrig, Ted Williams, Mickey Mantle et tant d’autres… ) mais aussi Sinatra, les Kennedys, Marilyn, la mafia italo-américaine, quelques stripteaseuses, Arthur Miller et bien d’autres personnages bien moins connus mais pas moins importants dans un New York brillant et décadent. A la fois manipulateur et manipulé dans cette jungle mal famée, le centre du Monde de la ville elle-même centre du Monde, DiMaggio nous enchante, nous charme un instant avant de nous révolter, voir nous dégoutter à la page suivante. Le livre est le parfait antidote à tout excès d’idolâtrie mais aussi une immense fresque sur la vie d’un homme et de son époque. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

OBLIGATOIRE:
Signez par votre nom sous cette forme: prénom, nom, ville, club (le cas échant)
ou créer un compte, et vous ne serez plus jamais embêté

Sans quoi NOUS NE PUBLIERONS PAS vos commentaires!